Le télétravail « n’est pas une option » mais « une obligation »

C’est ce qu’a affirmé jeudi 29 octobre Élisabeth Borne lors de la conférence de presse donnée par Jean Castex sur le reconfinement. La ministre du Travail s’est voulue très ferme : « La règle est la suivante : un travailleur qui peut effectuer toutes ses tâches en télétravail doit le faire 5 jours sur 5 (...) Cette règle (est) inscrite dans la nouvelle version du protocole national en entreprise. Ce qui signifie qu’elle devient la traduction concrète de l'obligation de l'employeur d'assurer la santé des salariés. C'est donc une règle qui s'impose à tous. » Et donc aux travailleurs, salariés ou indépendants qui peuvent exercer leur activité à distance.  

 

Pour mémoire, la « loi travail » de 2017 a grandement assoupli les règles concernant le télétravail. Par exemple, il n’est plus nécessaire que votre entreprise ait mis en place un accord collectif pour que vous puissiez travailler depuis chez vous. Ce qui signifie que vous pouvez demander à votre employeur à bénéficier du télétravail en cas d’imprévus (grève des transports, enfants malades, etc.) ou par convenances personnelles (travailler au calme, etc.), à la condition de décider avec lui d’une organisation par tout moyen, écrit (courrier ou mail) ou oral.

 

Dans certains cas, votre employeur peut même vous imposer de télétravailler. L’article L1222-11 du Code du travail stipule en effet « qu’en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés ». Pour les entreprises qui ne peuvent pas basculer tous les postes en télétravail, le texte préconise la mise en place un système de « rotation ».

Bon à savoir 

Selon différentes études, dans le secteur privé, près de 8 millions d’emplois – soit plus de 4 postes sur 10 – sont aujourd’hui compatibles avec le télétravail.

Chômage partiel : votre entreprise peut-elle vous l’imposer ?

Oui, et vous ne pouvez pas refuser. C’est une décision du gouvernement destinée à éviter les licenciements.

Le 28 octobre, quelques heures avant l’annonce du reconfinement, l'exécutif a annoncé que le dispositif d'activité partielle ne connaîtrait pas le coup de rabot normalement prévu au 1er novembre. Concrètement, cela signifie que si vous bénéficiez de ce dispositif, vous toucherez 70 % de votre brut (84 % de votre net) et non pas 60 % (72 %), et ce quel que soit votre secteur d’activité. Les salariés au smic ou moins seront quant à eux indemnisés à 100%. Enfin, notez que le reste à charge à assumer pour les employeurs est maintenu à 15 % jusqu’à la fin de l’année. Les secteurs les plus sinistrés – à l’image de l’hôtellerie, la restauration, le tourisme ou les clubs sportifs notamment – bénéficient, eux, toujours d’un reste à charge nul.

Chômage partiel : quid pour les indépendants et les employés à domicile ?

Jusqu’au 31 aout 2020, les employés à domicile étaient éligibles au dispositif d’activité partielle. L’indemnisation, versée directement par l’employeur, correspondait à 80 % du montant net des heures non réalisées. L’employeur était remboursé du montant de l’indemnisation versée à son salarié, directement sur son compte bancaire. A ce jour, le dispositif n’a pas encore été remis en place.

 

Concernant les TPE, les indépendants et autres micro-entrepreneurs, l'État et les Régions ont mis en place un fonds de solidarité pour les aider depuis le début de la crise sanitaire. Suite au reconfinement, ce fonds de solidarité a été est réactivé à hauteur de 6 milliards d'euros.

 

Toutes les entreprises de moins de 50 salariés fermées administrativement pourront recevoir une indemnisation allant jusqu’à 10 000 € par mois, et ce quel que soit leur secteur d’activité et leur situation géographique.

 

De leur côté, les entreprises de moins de 50 salariés ne fermant pas mais subissant une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % pourront, elles aussi, bénéficier d’une indemnisation allant jusqu’à 10 000 € par mois.

 

Enfin, les indépendants et autres micro-entrepreneurs subissant une perte de plus de 50 % de leur chiffre d’affaires pourront bénéficier d’une aide pouvant aller jusqu’à 1 500 € par mois.

 

Toutes les entreprises éligibles, quel que soit le cas de figure, pourront recevoir leur indemnisation en se déclarant sur le site de la Direction générale des finances publiques à partir de début décembre.

Droit de retrait : qui peut l’exercer ?

À La Poste, chez les policiers ou les CRS, mais aussi dans les entreprises de livraison à domicile, de plus en plus de travailleurs font jouer leur droit de retrait. Prévu dans l’article L4131-3 du Code du travail, il permet à un salarié de quitter son poste de travail ou de refuser de s’y installer sans l’accord de son employeur s’il a un motif raisonnable de penser que sa situation de travail « présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection ». 

Compte tenu de la situation et de la dangerosité du coronavirus, la question de la qualification du risque est légitime. Mais d’après le gouvernement, cette justification n’est pas valable si l’employeur a mis en place les dispositions prévues par le code du travail, ainsi que les recommandations de l’exécutif (comme, par exemple, le fait dans un magasin alimentaire de faire respecter une distance de sécurité entre les clients et ses employés). « Le droit de retrait s’applique au cas par cas, salarié par salarié, entreprise par entreprise. Nous exigeons évidemment des entreprises qu’elles respectent les gestes barrières et les fassent appliquer. Si c’est le cas, elles respectent leurs obligations en matière de santé », précise-t-on au ministère du Travail.

Votre employeur peut-il vous forcer à poser des jours de congé et de RTT ?

Oui et non. L'article 7 du projet de loi d'urgence sanitaire pour faire face à l'épidémie de Covid-19, examiné samedi 21 mars et dimanche 22 mars au Parlement, est venu faire une entorse au Code du travail en accordant aux employeurs plus de latitude dans l’organisation du temps des salariés.

 Pour rappel, le Code du travail stipule que sans accord collectif, l’employeur ne peut « modifier l’ordre et les dates de départ moins d’un mois avant la date prévue ». L’article 7 du projet de loi d’urgence sanitaire, dans sa version initiale, autorisait pourtant le gouvernement à « permettre à tout employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates de prise d’une partie des congés payés, des jours de réduction du temps de travail et des jours de repos affectés sur le compte épargne-temps du salarié » en dérogeant « aux délais de prévenance et modalités d’utilisation ». Ce qui, en d’autres termes, signifiait que le gouvernement, par ordonnance, autorisait les entreprises à fixer unilatéralement une partie des dates de congés payés – limitées à six jours ouvrables – de ses salariés pendant la période de confinement. Une mesure finalement renvoyée à un accord de branche ou d’entreprise.

En revanche, le texte laisse aux entreprises la possibilité unilatérale d’imposer ou de modifier les dates de RTT ou de jours du compte-épargne temps. Un « effort raisonnable » demandé aux salariés alors que l’État « met en place un plan exceptionnel pour sauver l’emploi et éviter les licenciements », explique-t-on au ministère du Travail.

En résumé, votre employeur ne peut pas unilatéralement vous forcer à prendre des jours de congés pendant la période de confinement. Mais il peut vous imposer de poser des RTT ou des jours de votre compte-épargne temps dans la limite de six jours ouvrables.

Bon à savoir

Depuis le 2 novembre, un numéro spécial d’information sur les mesures d’urgences pour les entreprises et les associations en difficulté a été mis en place. Il s’agit du 08 06 00 02 45

Avertissement : Les informations fournies par LCL proviennent de sources dignes de foi mais ne sauraient entraîner sa responsabilité en cas d'inexactitude.

1) Etude Malakoff Médéric Humanis 2019
2) Dares - 2019
3) LogMeIn - 2018