“Je suis arrivée au Pôle de Sceaux en avril et j’ai contacté ce couple de clients pour me présenter, explique Fatima Oufkir, conseillère Banque Privée. En échangeant avec eux, j’ai décelé la présence d’enfants d’un premier mariage. J’ai également compris qu’ils avaient des idées très confuses sur les principes de transmission si l’un des deux venait à disparaître.” Une situation pourtant de plus en plus courante aujourd’hui mais pour laquelle les couples remariés sont généralement mal informés. Pour apporter au couple les conseils les plus avisés, Fatima Oufkir fait appel à Aurore Dardaine-Chaumier juriste-fiscaliste patrimonial.
Maintenir le train de vie
En matière de prévoyance, la problématique tourne généralement autour de deux sujets : en priorité maintenir le train de vie du conjoint survivant et assurer l’éducation des enfants. En présence d’un patrimoine immobilier, il faut aussi que les héritiers disposent de liquidités suffisantes pour acquitter les droits de succession. Sur tous ces plans, beaucoup se pensent couverts par leur prévoyance employeur. “Généralement, les gens ne savent pas qui est le bénéficiaire ni quel est le montant du capital assuré en cas de décès ou d’invalidité, remarque Aurore Dardaine-Chaumier. Il faut donc commencer par regarder comment ils sont couverts et compléter si besoin par une prévoyance individuelle.” Ce type de contrat prévoit généralement le versement d’un capital sur la base d’un pourcentage de la rémunération brute annuelle avec une majoration par enfant à charge. Le cas échéant, il peut aussi intégrer le versement d’une rente éducation pour les enfants jusqu’à la majorité ou plus couramment jusqu’aux 25 ans.
Protection partielle
Mais la situation spécifique des époux vient compliquer les choses.
“Les couples recomposés n’ont généralement pas conscience que le conjoint survivant n’est pas suffisamment protégé, explique Aurore Dardaine-Chaumier.
En présence d’enfants d’un premier lit et en l’absence de testament ou de donation entre époux, si Monsieur disparaît, 25 % de la succession revient au conjoint survivant, et 75 % aux enfants de Monsieur, c’est-à-dire les enfants communs et ceux issus de son premier mariage. Pour l’immobilier, on se retrouve donc dans une situation d’indivision légale. Cela peut vite poser problème si les enfants du premier mariage décident de quitter l’indivision.” La question de la pension de réversion est tout aussi défavorable à la nouvelle épouse, puisque la précédente conjointe peut prétendre à une part de la réversion au prorata des années de mariage. “En cas de décès prématuré avant le départ en retraite, un calcul de la pension de retraite à laquelle le défunt aurait pu prétendre sera établi. Il servira de base pour fixer le montant de la pension de réversion du conjoint survivant. Un âge minimal peut être requis pour la percevoir, précise Aurore Dardaine-Chaumier. Attention, la pension de réversion du régime général de la Sécurité sociale est soumise à des conditions de plafond de ressources du conjoint survivant. Reste la réversion issue des régimes de retraite complémentaire pour lesquels la réversion est en principe de l’ordre de 60 % sans conditions de ressources. Des majorations peuvent s’appliquer en fonction du nombre d’enfants restant à charge.” Il faudra le cas échéant partager la pension de réversion avec l’ex-époux s’il ne s’est pas remarié au prorata de la durée respective de chaque mariage.
Clause bénéficiaire démembrée
La première préconisation réalisée touche à la clause du contrat d’assurance-vie souscrit par Monsieur au bénéfice de son épouse. Aurore Dardaine-Chaumier suggère de protéger cette dernière par une clause démembrée qui attribue l’usufruit à madame et la nue-propriété aux enfants du couple. Elle préserve aussi la réserve héréditaire des enfants issus du premier mariage sur la succession.
"Avec une telle clause démembrée, le conjoint survivant est protégé par un capital dont il pourra disposer librement sans que les enfants ne soient lésés."
“Au décès de Monsieur, il est essentiel de prévoir la signature d’une convention de quasi-usufruit qui va fixer la créance que les enfants pourront récupérer au décès de leur mère. C’est ce que l’on appelle la créance de restitution”, précise Aurore Dardaine-Chaumier. L’usufruitier a en effet la libre disposition des fonds qui lui sont confiés… Ceux-ci constitueront une dette qui pourra s’imputer au passif de la déclaration de succession de l’usufruitier. La convention peut être signée devant notaire ou sous seing privé mais doit être enregistrée par les services fiscaux. La clause du contrat d’assurance-vie préconisée prévoit également au deuxième rang que l’ensemble des enfants de Monsieur deviennent bénéficiaires en cas de renonciation, de divorce ou de décès de Madame.
Une prévoyance temporaire
Mais il est surtout prudent de prévoir une prévoyance complémentaire temporaire, au moins jusqu’au départ en retraite de Monsieur : elle a pour but de garantir un capital décès à Madame afin de lui assurer des capitaux supplémentaires si son mari venait à disparaître. “C’est une assurance, précise Aurore Dardaine-Chaumier. Ce qui signifie que l’on paie à fonds perdu en l’absence de décès. Mais, c’est très peu coûteux à cet âge au vu du capital garanti.” Le coût de cette assurance qui couvre aussi la perte totale et irréversible d’autonomie s’établit en effet en fonction de l’âge et du capital à assurer. “Le capital est exonéré de droits quel que soit le bénéficiaire, souligne la juriste fiscaliste patrimonial. S’il ne s’agit pas du conjoint, seule la dernière prime annuelle versée avant 70 ans est fiscalisée sur le même principe que celui de l’assurance-vie.”
Des arguments convaincants
Le couple a rapidement été convaincu de la pertinence de ces conseils. “Le premier rendez-vous leur a permis de découvrir la situation et d’en prendre acte, indique Fatima Oufkir. Au deuxième entretien, nous avons pu aborder la clause bénéficiaire démembrée et la prévoyance temporaire.” Les différents coûts ont été simulés et le montant du capital décès nécessaire a été ajusté. “Ils ont vraiment adhéré à nos préconisations, reprend la conseillère. Aujourd’hui, je les conseille sur d’autres produits et ils sont très ouverts.”
LA PROBLÉMATIQUE
M. et Mme X, respectivement 54 et 53 ans, forment une famille recomposée avec deux enfants communs mineurs et deux enfants d’un premier mariage de Monsieur. Tous deux sont cadres supérieurs mais Monsieur assure près de 75 % des revenus d’activité du foyer. Monsieur a souscrit une assurance-vie dont Madame est bénéficiaire. Tous deux disposent d’une prévoyance employeur.
LA SOLUTION MISE EN PLACE
- Démembrement de la clause bénéficiaire du contrat d’assurance-vie avec usufruit au profit de madame et nue-propriété au profit des deux enfants communs. Au deuxième rang, en cas de renonciation, de prédécès de Madame ou de divorce, au bénéfice des quatre enfants de Monsieur.
- Souscription par Monsieur d’une prévoyance décès temporaire avec un capital de 300 000 euros au profit de Madame jusqu’à son départ en retraite afin de maintenir le train de vie de Madame et de financer l’éducation des enfants.
CONTEXTE FISCAL
- Taxation du contrat d’assurance-vie : usufruitier et nus-propriétaires sont considérés fiscalement comme bénéficiaires au prorata de la part de capital qui leur revient (selon barème prévu à l’article 669 du Code général des impôts), abattement de 152 500 euros par couple “usufruitier/nu-propriétaire” selon ce même prorata (la fraction d’abattement non utilisée par le conjoint survivant – qui est exonéré – ne bénéficie pas aux autres) à considérer tous contrats confondus ; taxation à 20 % par bénéficiaire jusqu’à 700 000 euros et à 31,25 % au-delà (hors prélèvements sociaux).
- Capital décès versé au conjoint exonéré de fiscalité. Pour les autres éventuels bénéficiaires, fiscalité assise sur la dernière prime annuelle versée avant 70 ans.
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