Picasso est donc le héros de l’automne parisien ?

Oui, la saga Picasso se poursuit puisque, ne l’oublions pas, nous avons eu un été très picassien avec pas moins de quatorze expositions de Nice à Montpellier grâce aux généreux prêts du musée Picasso Paris et de son directeur Laurent Le Bon. Paris n’est donc pas en reste à la rentrée avec trois expositions majeures. D’abord, Picasso bleu et rose au musée d’Orsay (jusqu’au 6 janvier). C’est un événement qui n’a été possible que grâce à la pugnacité des commissaires de l’exposition qui ont pioché des œuvres dans trente-sept collections publiques et privées du monde entier. Un exploit quand on sait la difficulté pour obtenir le prêt de ces œuvres de 1901 à 1906, qui valent aujourd’hui des sommes folles en ventes publiques.

Ce rassemblement permet de comprendre les débuts de l’artiste, lorsqu’il quitte Barcelone et vient à l’Exposition universelle de Paris en 1900, puis lorsqu’il s’installe à Paris l’année suivante. Il réalise alors des œuvres dans l’esprit de Van Gogh et de Toulouse-Lautrec et se crée ensuite son propre style avec des œuvres en camaïeu de bleu montrant les cabarets et les maisons closes, les prostituées de la prison Saint-Lazare et les mendiants. Puis vient la période rose de 1904 à 1905 avec ses saltimbanques, Picasso se représentant lui-même en Arlequin déclassé. Cette géniale exposition se termine sur le séjour que Picasso fait à Gosol en compagnie de la belle Fernande Olivier. Se nourrissant de la sculpture romane ibérique et de sources primitives, il se lance dans un art nouveau qui le conduira aux Demoiselles d’Avignon et au cubisme en compagnie de Braque.

Vous parliez de deux autres expositions parisiennes autour de Picasso ?

Le Centre Pompidou présente ce qui pourrait être la suite de l’exposition du musée d’Orsay.Le cubisme(du 17 octobre au 25 février) raconte l’aventure cubiste avec les découvertes fondamentales de Braque et Picasso, et ouvre ensuite le sujet aux autres artistes ayant regardé du côté du cubisme comme Fernand Léger, Albert Gleizes ou Robert Delaunay. Un vrai panorama de la création cubiste ! Enfin, le musée Picasso-Paris propose un dossier original intituléChefs-d’œuvre !(jusqu’au 13 janvier), s’interrogeant sur les ingrédients qui font les chefs-d’œuvre, le rôle de la critique et de la réception publique des pièces qu’elles soient monumentales ou toutes petites.

“Au musée Marmottan-Monet, ce sont les toiles impressionnistes et postimpressionnistes en mains privées, réunies dans un même lieu, qui font l’événement. C’est unique et cela ne se reproduira pas de sitôt !”

Paris propose d’autres événements à l’automne ?

Bien sûr, cette rentrée est exceptionnelle. Si l’on veut faire un balayage chronologique, il faut commencer par le musée Jacquemart-André (jusqu’au 28 janvier), qui confronte une dizaine de toiles de Caravage, le peintre italien de la fin du XVIesiècle et du début du XVIIequi a révolutionné la peinture en choisissant des modèles trouvés dans la rue et en jouant sur les effets de lumière. Ses œuvres sont mises ici en parallèle avec celles de ses contemporains romains comme Bartolomeo Manfredi ou les Gentileschi, qui étaient ses admirateurs et souvent ses rivaux. Au musée Marmottan-Monet, ce sont les toiles impressionnistes et postimpressionnistes en mains privées qui font l’événement (jusqu’au 10 février). Imaginez des œuvres de Van Gogh, Caillebotte, Bonnard et Vuillard prêtées par de prestigieux collectionneurs internationaux – Scott Black, Juan Antonio Pérez Simon, les frères Nahmad… – et réunies dans un même lieu. C’est unique et cela ne se reproduira pas de sitôt ! Et puis l’autre événement parisien est la double expositionEgon SchieleetJean-Michel Basquiat(jusqu'au 14 janvier) montée par la Fondation Louis-Vuitton au bois de Boulogne. Deux héros de la peinture, l’un décédé à 28 ans, l’autre à 27, se répondent avec leurs œuvres criant leur rage de créer, à Vienne pour Schiele et à New York pour Basquiat. Enfin, pour le contemporain, le Centre Pompidou montre le parcours complet de l’Autrichien Franz West et la conception de ses œuvres-meubles (jusqu’au 10 décembre) tandis que le Palais de Tokyo a invité l’Argentin Tomas Saraceno et ses toiles d’araignées (du 17 octobre au 9 janvier).

J’imagine que les musées et centres d’art en régions ont eux aussi des expositions importantes…

Au LaM de Villeneuve-d’Ascq, c’est la danse qui est à l’honneur avecDanser brut(jusqu’au 6 janvier) réunissant des artistes comme Charlie Chaplin ou Nijinski et des plasticiens contemporains comme Arnulf Rainer ou Eduardo Arroyo. Toujours dans le Nord, le Louvre-Lens parle d’amour (jusqu’au 21 janvier) en regroupant deux cent cinquante sculptures, peintures et objets d’art décrivant les relations amoureuses. Enfin tout au sud, l’hôtel de Caumont à Aix-en-Provence abrite (du 1ernovembre au 24 mars) un Chagall en noir et blanc, de la gravure et du dessin jusqu’à ses recherches expressives autour de la couleur. L’un des points importants de cet automne culturel est la réouverture de trois musées de région. La Piscine de Roubaix s’agrandit de trois cents mètres carrés consacrés à la sculpture moderne (le 20 octobre), puis le musée de Picardie à Amiens (le 11 novembre) et le musée de Besançon (le 16 novembre) dévoilent le raccrochage de leurs collections. Autant de sorties culturelles à inscrire d’urgence dans son agenda !